Chers frères et sœurs dans le Christ, « la Pentecôte, clôture du temps pascal, est une fête particulière et, en même temps, bien générale, bien particulière, en ce sens qu’on ne la célèbre que ce jour, cinquantième jour après Pâques, comme une sorte d’aboutissement, d’épanouissement pascal, mais générale parce qu’elle ouvre la route de l’Eglise, l’aventure du peuple de Dieu, le peuple chrétien ! », c’est de Henri Denier dans ‘Cent mots pour dire la foi’.
Donc, frères et sœurs, Pâques, Ascension et Pentecôte sont trois manières de dire le même évènement mais, pour en exprimer la richesse, il nous faut insister sur les accents différents, c’est tout le sens de la première lecture que nous venons d’écouter. Luc reprend la cinquantaine juive, après Pâques, dans son cadre d’action de grâces, je dirais ‘eucharistique’ pour la loi, mais aussi pour la moisson, et Luc cherche à exprimer l’irruption de l’Esprit provoquée par la résurrection du Christ : le vent, le feu, les langues. En fait c’est un vrai baptême dans l’Esprit et le feu, comme l’annonce Jean Baptiste dans Luc 3 verset 16, qui se produit à la Pentecôte. Cette irruption atteint tous les hommes de bonne volonté de tous les pays alors connus sur l’atlas du temps.
Dieu descend pour nous communiquer son souffle de vie destiné à renouveler la face de la terre, de notre monde, à remplir chacune des personnes présentes, et présentes ici, de force et d’audace. Brûlantes du même feu, ces personnes vont former une communauté nouvelle : l’Eglise ! Comme le baptême d’eau a inauguré le ministère de Jésus, le baptême de l’Esprit est à l’origine de la prédication apostolique à toutes les nations. Ainsi, parés de l’Esprit Saint, nous pouvons, en vrais disciples du Christ, trouver les mots justes que le monde pourra comprendre, notre monde d’aujourd’hui, je dirais ‘sans décodeur’, une inculturation ou interculturalité, comme d’autres le disent, à réinventer sans cesse pour rejoindre les périphéries proches et lointaines. Frères et sœurs, dans notre monde où les moyens de communication ne cessent de se développer, quelle est cette voix qui touche le cœur de tous, donc que tous comprennent ? N’est-ce pas la voix de l’amour, du respect, de la bienveillance ? Donc, la voix du fruit de l’Esprit ?
Avec l’intransigeance que nous lui connaissons, Paul, apôtre des nations, semble nous présenter l’alternative, Cher Esprit, comme simple à résoudre alors que, vous et moi, savons bien qu’il n’est pas souvent facile de démêler les fils de l’écheveau et qu’il faut nous en remettre quotidiennement à la miséricorde de Dieu. En fait, Paul le sait lui aussi. Rappelons-nous de son cri de cœur aux Romains 7, 15 : « Vraiment, ce que je fais je ne le comprends pas car je ne fais pas ce que je veux, je fais ce que je hais ! ».
Mais Paul insiste car il veut notre liberté, la liberté pour nous, les chrétiens, et l’Esprit que nous avons reçu, frères et sœurs, nous permet de vivre d’une manière qui surpasse la loi, je dirais toute loi, et celle que nos Etats nous imposent encore aujourd’hui ! Paul nous exhorte à la confiance en l’Esprit Saint ainsi qu’à un discernement et, en fin de compte, à un combat spirituel dont l’enjeu est pour nous essentiel car l’Esprit nous fait vivre ! Satisfaire les convoitises de la chair c’est donc aller à la mort !
Le Christ serait-Il donc mort pour rien ? Heureusement non ! Jésus Lui-même nous rassure dans ses discours d’adieu : avant même de donner l’Esprit de la Résurrection à ses apôtres, l’Esprit Saint nous fera connaître toute chose au moment opportun et tracera un passage au milieu des situations parfois complexes et douloureuses de nos existences. En effet, Jean montre dans ce passage de l’Evangile l’unité du mystère pascal : dès son élévation sur la croix, Jésus est introduit auprès du Père et, d’auprès du Père, Il nous envoie l’Esprit qui vient du Père.
La première mission de l’Esprit Saint c’est d’être défenseur du Christ et conséquemment de ses disciples dans le monde ! L’Esprit Saint, nous le savons, n’ajoute rien à ce qui a été révélé à la résurrection car, ressuscitant son fils, le Père a tout dit de la Bonne Nouvelle, celle de la victoire de la vie sur la mort ! En d’autres mots, l’Esprit Saint n’est pas un ‘électron libre’ si vous me permettez. De même que Jésus n’a rien dit ni fait sans le Père, l’Esprit nous fait connaître Jésus ! Il est donc impossible à qui que ce soit, même à nous qui exerçons une part d’autorité dans l’Eglise, d’imposer nos idées propres, nos extravagances, notre pouvoir sous couvert de prétendues inspirations.
Dans notre monde hyper médiatisé, qu’est-ce qui fait l’unité de l’information et la vérité de ce que nous avons envie de recevoir et de partager avec les autres ? A mon avis, c’est la Parole de vie, la Parole de Jésus Christ ! Nous le savons, elle n’est pas une information supplémentaire ni un avis sur l’histoire de notre monde, cette Parole vient nous rejoindre dans notre aspiration profonde pour faire résonner en nos cœurs l’Amour du Père.
Frères et sœurs, auditeurs de la Parole aujourd’hui, ici, maintenant, redécouvrons que l’Esprit Saint n’est pas un simple agent de communication facilitateur de rencontre, Il est avant tout le vecteur de toute relation qui rend témoignage à la Vérité en donnant la Vie au double commandement de l’Amour. L’Esprit rend capable d’entendre tout ce que l’autre manifeste de l’amour.
En cette fête de Pentecôte, dans la mouvance de la Pâques, que l’Esprit Saint, frères et sœurs, fasse résonner en notre cœur les mots divins qui nous disent l’Amour de Dieu, l’amour du prochain, au cœur des tempêtes du monde. VIENS, ESPRIT SAINT !
Père Théodore
Abbé de Dzogbegan (Togo)
Abbaye Saint Benoît d'En Calcat - 81110 DOURGNE